Vichy : mes voisins, ces inconnus

06/10/2020

Ils vivent et se côtoient parfois pendant plusieurs années sans tellement se connaitre. Ces femmes et ces hommes aux parcours et aux histoires multiples qui partagent aujourd'hui une chose, seulement le même nom de rue.

Il est 10h30 en ce samedi d'octobre pluvieux à Vichy et certains riverains s'aventurent dans un froid presque hivernal. Dans cette partie du Boulevard Carnot, de l'autre côté de l'avenue des Célestins, artère principale de la ville, les habitants apprécient le calme et la proximité avec certains commerces. La boucherie, la pharmacie et le bar rythment la vie de ces vichyssois dans cette petite portion de rue.

Ici, appartements et maisons se partagent le boulevard. C'est l'une des spécificités. Les maisons sont construites de manière que chacune dispose d'une cour ou d'une terrasse mais pas de vis-à-vis. Les appartements eux, donnent une allure différente à la rue. Ce sont souvent des gens de passage, des étudiants, des locataires qui s'y installent pour construire un moment de leur vie.

« Un retour aux sources »

Nicole et Yves, 67 et 75 ans, sont eux des natifs de la région. Revenus s'installer en Auvergne après avoir construit leurs carrières respectives dans la fonction publique à Paris, le couple apprécie ce « retour aux sources ». Propriétaires de leur maison sur trois étages, au numéro 88, les jeunes retraités apprécient tout particulièrement le calme de la ville, « qui se visite à pied, en levant la tête », souligne Nicole, qui aime retourner « sur les pas de Napoléon III, au temps de la Belle Epoque ».

Les retraités vivent à Vichy six mois dans l'année. « Le reste du temps, nous rejoignons notre fille, partie vivre en Nouvelle Calédonie », souffle fièrement Yves. Pendant le confinement, des élans de soutien ont vu le jour. « Nous avons joué la solidarité, pour ne laisser personne dans le besoin, en prenant des nouvelles des plus âgés », souligne Nicole. Depuis, les relations sont revenues comme avant, les voisins continuent d'observer les allées et venues tout en se saluant. « Nous essayons d'être sympathiques mais pas envahissants », conclut le couple.

Un espace social et solidaire

De l'autre côté du boulevard, plus près de l'avenue des Célestins, se trouve la résidence Adoma, organisme d'accueil social et solidaire pour le compte de l'Etat. Elle porte le nom de Villa Claudius Petit. Ici le voisinage prend un tout autre sens. Des personnes aux parcours de vie différents partagent l'endroit.

Un univers cosmopolite s'y est créé. Ils y vivent seuls, en couple ou en famille. Ils viennent de l'autre côté de la Méditerranée et ont souhaité rejoindre l'hexagone pour vivre « une autre vie », souffle Dorcaes, dans un français approximatif. La trentenaire, enceinte de son premier enfant, vient de Côte d'Ivoire et est installée à Vichy depuis 2008. Avec son mari Prosper, 36 ans, ils vivent en studio. « Après notre demande d'asile, nous avons été accueillis ici, même si nous souhaitions vivre à Paris ».

Une trentaine de logements est mise à disposition. Camara, 22 ans, est aussi résident. Arrivé de Guinée et installé à Vichy il y a moins d'un an, « cette solution n'est que temporaire », indique-t-il. Entre eux, les locataires partagent des événements festifs. Depuis la Covid-19, « ces relations se sont dégradées, assure le jeune homme, le port du masque a fait peur aux habitants et réduit les échanges aux simples salutations ».

Une proximité géographique qui engendre paradoxalement une distanciation physique et une peur de l'autre. Difficile alors de créer du lien social et d'apprendre à connaitre ceux avec qui on partage quelque chose, uniquement le nom d'une rue.


Jade Sauvée


Article réalisé pour la Prépa La Chance

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